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26 mai 2022 4 26 /05 /mai /2022 09:36

Rappel de ses années de guerre.

1914.

A la déclaration de guerre, Giono (né le 30 mars 1895 et qui n'a donc pas encore vingt ans) échappe à la mobilisation pour "complexion fluette" (sic) et il voit partir son ami d'enfance Louis David qui n'en reviendra pas.

En fin d'année il est "rattrapé" et envoyé comme élève-aspirant à Montségur dans la Drôme.

1915

Il ne sera jamais aspirant mais en Janvier  sera incorporé soldat de 2ème classe à Briançon au 159° Régiment d'Infanterie Alpine, 6ème compagnie, capitaine Vidon. 

Il va rester à l'arrière jusqu'en Mai 1915 et c'est durant cette période qu'il dût suivre un stage de Transmissions.

1916

En Août il se trouve dans le secteur des Eparges sans avoir participé à la dure bataille qui y eut lieu en 1915.

En mai il apprend la mort en Alsace de son ami Louis David. Il lui dédiera son récit de guerre le Grand Troupeau.

Il passe (volontaire) agent de transmissions et le restera jusqu'à la fin.

1917

Il est agent de transmissions (téléphoniste mais aussi signaleur optique) dans les secteurs de Soissons, du Chemin des Dames et autres.

1918

Il se trouve dans les secteurs du Kemmel, de Wissembourg, de Reims (bataille). 

1919

Il est démobilisé en Octobre.

 

                                                                  --oOo--

 

L'Entre-deux guerres.

1920

Année de la mort du père, Antoine Giono, âgé de 75 ans, et du mariage de Jean avec Élise Pourcin.

Celle-ci est institutrice remplaçante à Redortiers, village perdu du Contadour. Elle le sera aussi mais peu de temps en Corse avant d'être nommée à Manosque. 

Jean a retrouvé sa place au Comptoir d'Escompte de Manosque où il est affecté au service des titres. 

C'est la période des premiers poèmes dont certains publiés dans la revue marseillaise La Criée dans les années 1921/22.

1923

Année marquante pour l'écrivain débutant avec la publication dans les Cahiers de l'artisan de Lucien Jacques d'Accompagné de la flûte recueil de 16 poèmes d'inspiration gréco-latine, des "accompagnements de flûte aux divines phrases de Virgile et Platon" (sic) placées en épigraphe de chacun d'eux. 

Dans les années suivantes Giono sera publié dans diverses revues locales mais s'applique surtout à la rédaction de son premier roman. 

1929

Année décisive, celle de la publication de Colline.

Gide est enthousiaste et salut la naissance d'un grand poète-écrivain. 

La même année sort Un de Beaumugnes.

193o

Parution de Regain clôturant ainsi ce qu'il avait entrepris d'écrire sous le titre de "Trilogie de Pan".

A 35 ans Giono est devenu un écrivain reconnu et apprécié.

Le Comptoir d'Escompte où il travaille maintenant comme fondé de pouvoirs ayant décidé de fermer son agence manosquine, Giono décline l'offre d'un poste similaire qu'on lui propose à Marseille pour vivre désormais de sa plume.  Marié, père de deux enfants, soutien de famille, la décision était grave mais il est confiant en sa force créatrice et l'avenir lui donnera raison.  Il a déjà en réserve plusieurs écrits prêts à être publiés et qu'attendent avec impatience ses deux éditeurs Grasset et Gallimard.

C'est donc une autre année décisive pour Giono qui va pouvoir désormais se consacrer uniquement à son œuvre.

D'ailleurs elle ne se terminera pas sans la sortie  de Naissance de l'Odyssée et d'une chronique Présentation de Pan.

1931

Dix ans après sa démobilisation, Giono fait paraître le Grand Troupeau. Ce sera la seule fois où il évoquera son expérience de la guerre 14/18 mais par le truchement d'un narrateur et avec des aller-retour entre le front et ceux qui sont restés au pays (les femmes, les vieux, les enfants).  De son aveu ce livre lui donna beaucoup de mal lui prenant deux ans et avec beaucoup d'hésitations, contrairement à cette grande facilité de rédaction qu'il a toujours eue. Il est dédié "à un homme mort et à une femme vivante" .  L'homme mort est Louis David, son ami, tué en Alsace en 1915.  Quant à la femme ?

Il publie également la même année Manosque des Plateaux.

1932

Sortie de Jean le Bleu, récit en grande partie autobiographique.

La même année, Solitude de la pitié, recueil de nouvelles et autres textes. 

1933

Sortie du Serpent d'étoiles, un récit où Giono fait la rencontre d'un berger qui va lui faire vivre l'étrange fête annuelle des bergers entre eux dans les collines à Mallefougasse.

Les premières manifestations de Giono militant pacifiste et contre la nouvelle guerre qui s'annonce date de cette année où il est nommé président du comité d'action contre la guerre des Basses Alpes.  Témoin des horreurs de la Première, il entend bien ne pas rester impassible et a soif d'action.  Il s'en fait un devoir

A son corps défendant, Giono va donc être mêlé à la politique alors qu'il est tout sauf un militant politique.  Son message est humaniste et universel, n'appartient à aucun parti, un point c'est tout.  Mais comment échapper à l'amalgame, la récupération, en ces temps là ?  Il en fera les frais et aussi par naïveté et imprudence disons-le.    

1934

Le chant du monde, titre repris du poète américain Walt Whitman que Giono avait découvert et aimé grâce à Lucien Jacques. Roman lyrique et plein d'action et rebondissement le rendant de ce fait tout à fait adaptable au cinéma, ce qui fut fait d'ailleurs.

1935

C'est l'année (Septembre) du premier "Contadour" et de la parution de Que ma joie demeure (Mars) œuvre peut être la plus connue mais aussi la plus controversée et par l'auteur lui-même. Sorte d'hymne à la Nature, au retour à la Terre, au rejet de la civilisation moderne. Ce livre aura un grand retentissement auprès d'une certaine jeunesse notamment celle des A.J.

Le Plateau Grémone est une sorte d' "utopia" où les rares habitants vivant isolément vont découvrir grâce à un acrobate-prophète du nom de Bobi la mise en commun du travail pour trouver plus de temps pour l' "inutile" qui agrémente la vie (faire pousser des fleurs, élever un cerf et ses biches, se rencontrer entre voisins, etc...).

D'aucuns voulurent y voir un Giono "communiste" et le récupérer dans leur camp. Complètement à tort d'ailleurs mais étiquette qui devait lui coller à la peau.

1936

Parution des Vraies Richesses, complément en quelque sorte à Que ma joie demeure.

1937

Refus d'obéissance  dédié "à mon ami Louis David" est le premier des manifestes pacifistes de Giono et le début de son engagement contre la guerre qui s'annonce.

Il ne peut oublier ce qu'il a vécu avec ceux de sa génération dans les tranchées, et il se refuse à ce que ça recommence.  Il est pour un pacifisme intégral et intransigeant refusant tout ordre de mobilisation. "  Il faut se méfier des bâtisseurs d'avenir, surtout quand, pour bâtir l'avenir des hommes à naître,  ils ont besoin de faire mourir les hommes vivants. L'homme n'est la matière première que de sa propre vie. Je refuse d'obéir. " (sic)

Mais en même temps il écrivait aussi Bataille dans la montagne son plus long roman qui paraîtra la même année.

Marcel Pagnol tourne son adaptation de Regain avec Fernandel et Orane Demazis.

1938

Parait le poids du ciel  réflexions sur le monde moderne ainsi que sa longue Lettre aux paysans sur la pauvreté et la paix. Autre manifeste anarcho-pacifiste universel mais complètement utopique.  Exemple : il invite les paysans en cas de guerre à "détruire leur stock de blé excédentaire en leur possession et ne plus cultiver la terre que pour leur propre nourriture" (sic). Il s'agit d'affamer les faiseurs de guerre.  Et il s'adresse là au monde entier. 

1939

C'est l'année de la déclaration de guerre (Septembre) et du 9ème et dernier "Contadour" (Août) où Giono a renvoyé les contadouriens en invitant chacun face à la guerre imminente à "faire son compte" de ce qu'ils ont vécu ensemble. 

Paraissent successivement Précisions au sujet de ses prises de position contre la guerre et Recherche de la pureté autres points de vue sur la guerre.

Giono est arrêté le 16 septembre pas tant peut être pour ses publications pacifistes antérieures que pour ce tract "PAIX immédiate !" à l'initiative d'un groupe d'écrivains et de journalistes "de gauche" à la liste desquels le nom de Giono fut rajouté sur les instances d'Hélène Laguerre qui était alors sa maîtresse. 

Il sera libéré du fort Saint Nicolas de Marseille à la mi-novembre, soit deux mois d'internement. 

Giono rejoint Manosque et les siens dégagé de toute obligation militaire.

Mais c'est pour lui l'ouverture d'une période agitée avec la "drôle de guerre" suivie de l'invasion et de l'occupation allemande.  Giono est amer, il n'a pu désamorcer la guerre, et "ça recommence". Il ne "militera" plus désormais mais, restant "dans le collimateur", il manquera de prudence en plusieurs occasions ce qui lui nuira. 

Ses idées pacifistes et ses écrits "apologétiques" du retour à la Nature, à la Terre,  vont d'abord être récupérés par les pétainistes car dans l'esprit du "Travail Patrie", avant qu'elles ne se retournent contre lui à la Libération. 

En résumé, disons que toute l'affaire "politique" de Giono ne fut en réalité qu'un ÉNORME malentendu. Ce malentendu lui vaudra de fortes inimitiés, des menaces de mort, une interdiction de publier car figurant sur la "liste noire" des écrivains collabos.

Il faudra attendre une dizaine d'années pour qu'il se dissipe et que Giono retrouve sa stature selon l'expression de son biographe Pierre Citron.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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