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6 juin 2012 3 06 /06 /juin /2012 16:34

(Echo de l'île de la Réunion n° 162 de Juin 2012)

 

La vanille réunionnaise s'accroche-t'elle encore ?...  Les chiffres sont là, la production a considérablement  baissé, à peine quatre tonnes en 2009 ( pour 30 tonnes il y a 25 ans, 200 tonnes il y a cent ans !...) ... Les acteurs locaux nourrissaient pourtant de grands espoirs sur cette filière misant sur la qualité incontestable.  Mais il faut se rendre à l'évidence, elle n'a plus vocation à se placer sur le marché mondial spéculatif et concurrentiel dominé par Madagascar (plus de 2000 tonnes exportées) où elle se négocie à un prix dix fois inférieur à celui de la vanille réunionnaise, le problème est là avec un coût de main d'oeuvre sans commune mesure.  Est-ce à dire que celle-ci est proche de la fin, cette culture emblématique de notre île, vieille de deux siècles, faisant partie de ses armoieries avec sa devise latine "florebo cocumque ferar"  ?  Pas forcément.  En dépit du climat morose de ces dernières années, Bertrand COME a voulu réagir, faisant preuve d'un bel optimisme, à condition de se positionner sur de bons créneaux où la qualité est mieux prise en compte, en créant  " la Vanilleraie" installée sur les terres du Grand Hazier à Sainte Suzanne, propriété de la famille CHASSAGNE, reprenant en fait l'idée de l'ex "Maison de la Vanille" de la famille de FLORIS à Saint André fermée en 2008, autrement dit associer le patrimoine (grande villa créole, maison de maître, et domaine attenant) à une activité agricole ou florale avec visites payantes.  "la Vanilleraie" travaille avec une quarantaine de producteurs.  Traditionnellement la vanille se cultivait principalement dans les régions de St Philippe, Ste Rose et St André, chacun de ces "terroirs" n'ayant pas le même goût selon les spécialistes.  La vanilleraie du Grand Hazier cultive la vanille sous ombrières et non sous couvert boisé et se livre à des essais de variétés pour voir si les différences de gousses ou d'aspect des lianes se traduisent par des différences d'arômes.  Certes il a fallu renoncer au marchés extérieurs notamment japonnais faute de production suffisante mais Bertrand COME se dit convaincu que la vanille réunionnaise a encore une marge de progression sur le créneau local et métropolitain. 

Quant à "Provanille" issu de l'ancienne coopérative de vanille de Bras-Panon, elle s'en tire encore aujourd'hui mais à une échelle très réduite écoulant tant bien que mal sa vanille sur les sites touristiques de l'île. Le produit est de qualité certes (label vanille Bourbon de l'île de la Réunion) mais cher.

C'est à partir de 1930 en fait que la vanille réunionnaise a commencé à ressentir la concurrence d'autres pays et celle de la vanilline de synthèse.  A l'époque il y avait 309 exploitations sur 500 hectares.  Malgré un plan de relance, la baisse brutale des cours mondiaux, de nombreuses exploitations arrêtèrent la vanille.  Une réorientation économique et des aides européennes dans les années 1990 permirent de stabiliser la production mais celle ci devait reprendre sa chute et selon le dernier recensement agricol elle ne représente plus que 187 hectares répartis sur 109 exploitations (dont 40 seulement en culture exclusive) situées en majorité sur les communes de St Philippe et de Ste Rose.  A 90% la vanille est cultivée en sous bois sur des concessions domaniales, 9% en plein champ et 1% seulement en culture intensive sous ombrière. 

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1 juin 2012 5 01 /06 /juin /2012 17:24

(Echo de l'île de la Réunion n° 162 de Juin)

 

Philippe COMMERSON, BORY de Saint VINCENT, deux botanistes, Dieudonné de GRATET de DOLOMIEU, géologue, noms bien connus à la Réunion d'autant qu'ils ont été donnés à des cratères du Massif de la Fournaise : cratère Commerson, cratère Bory, cratère Dolomieu (d'où vient aussi le nom du massif alpin des Dolomites).  Un autre botaniste, injustement oublié, a pourtant séjourné à Bourbon de 1796 à 1799 s'agissant de Louis-Marie Aubert  DU PETIT THOUARS qui n'était autre que le frère (aîné) d'Aristide Aubert DU PETIT THOUARS, officier de marine français qui fit partie de l'expédition de Bonaparte en Egypte, commandant le "Tonnant", et qui périt à Aboukir en 1798. 


Or, Nicole CRESTEY, professeur de Sciences de la Vie et de la Terre (SVT) à la retraite, passionnée par la vie des naturalistes du XVIIème siècle, au travers de sa conférence "à la recherche de la Pérouse, les frères Du Petit Thouars",  vient de nous éclairer sur ce botaniste qu'on a oublié ici et dont les travaux, 190 ans après, font toujours autorité.  Moins ingrate, la capitale, Paris, a donné son nom à une de ses rues (IIIème arrondissement, quartier du Marais). 


Ces deux frères étaient issus d'une noble famille poitevine remontant à 1390, fils de Gilbert Louis Antoine DU PETIT THOUARS dit le chevalier Du Petit Thouars,  et de Maria GOHIN, dame de Bonmois.  Ils naquirent l'un et l'autre au château de Bonmois près de Saumur (commune de St Martin de la Place), ancien château féodal du XV appartenant initialement à la famille De THORIS originaire du Bourbonnais, et dont la famille GOHIN était devenue propriétaire.  

 

En 1791, une expédition officielle conduite par l'Amiral Antoine BRUNI d'ENTRECASTEAUX avait été envoyée à la recherche de la Pérouse  chargé en 1785 par Louis XVI d'une expédition d'exploration dans le Pacifique et dont les navires avaient disparus corps et biens. 

 

Or un marin français de 31 ans, Aristide Aubert DU PETIT THOUARS qui se trouvait en poste en Angleterre aurait bien voulu faire partie de l'expédition d'Entrecasteaux mais il était retenu sur place.  Qu'à celà ne tienne, il décida alors, en accord avec son frère Louis-Marie Aubert, botaniste de son état, de monter une expédition privée.  Pour ce faire, ils vendirent une partie de leurs biens, lancèrent une souscriptions à laquelle le roi Louis XVI contribua, pour financer l'achat d'un bateau et tous les frais.  Les deux frères s'étaient donné rendez vous à Brest pour un départ en Juillet 1792 mais, pour quelle raison exactement (?), Aristide Aubert fut arrêté et emprisonné de sorte que son frère le botaniste partit sans lui tout en lui donnant un autre rendez vous au Cap.  Deux mois plus tard, le frérot n'était toujours pas là ... et ne devait jamais arriver en fait, ni même revoir son frère aîné.  On ne sait trop ce qui lui arriva exactement  mais il semble qu'il réussit à s'évader et à gagner le Brésil d'où il fut rapatrié au Portugal et emprisonné de nouveau, réussissant une nouvelle fois à s'évader pour rejoindre la France où il s'enrôla dans la campagne d'Egypte de Bonaparte et au cours de laquelle il trouva la mort à Aboukir.  

Louis-Marie Aubert, sans nouvelles de son frère et pour cause, décida alors de s'embarquer pour l'île de France (Maurice) où il débarqua sans argent, ne disposant même pas d'un lot de livres scientifiques de référence.  Il se mit pourtant au travail et pendant neuf ans il va explorer et étudier la flore de l'île,  pendant six mois celle de Madagascar où il contracta le paludisme pour arriver enfin et très affaibli à l'île Bourbon en 1796 où il restera jusqu'en 1799.  Au cours de ce dernier séjour, il fit de nombreuses découvertes, récoltant plus de deux cents plantes.  Son ouvrage sur les orchidées en particulier reste d'ailleurs une référence.  Il en a recensé pas moins de 93 espèces en 110 planches illustrées dont 80 espèces (60 de l'île de la Réunion) découvertes par lui-même.  A son retour en France en 1802, il publia son ouvrage intitulé : "Histoire particulière des plantes orchidées recueillies sur les trois îles australes d'Afrique : de France, de Boubon et de Madagascar".  Il fut nommé directeur des pépinières impériales du Roule (rue du Roule à Paris) et fut admis à l'Académie des Sciences. Il s'éteignit à Paris à l'âge de 73 ans. 

 

Un grand merci à Madame CRESTEY. d'avoir ainsi rendu justice à ce grand scientifique.

   

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15 février 2012 3 15 /02 /février /2012 15:00

Jean-Baptiste L'Islet-Geoffroy


Parmi les Réunionnais célèbres il en est un qui, sans être des plus connus (à tort), eut une personnalité attachante.  Il s'agit de L'Islet-Geoffroy dont le nom a été attribué en 1976 au lycée technologique du Butor  à Saint-Denis et à bon droit car il fut homme de sciences. 

Il naquit le 23 Aout 1755 à Saint-Pierre d'une esclave originaire de Guinée, Niama, fille de roi dans son pays mais vendue à 19 ans à un agent de la Compagnie des Indes après la mort de son père. Elle vécut d'abord à l'île de France (Maurice) avant d'être rachetée par un ingénieur de la Compagnie du nom de Jean-Baptiste GEOFFROY qui, l'ayant affranchie, l'emmena à l'île Bourbon (la Réunion) où il se fixa avec elle au lieu-dit  Bassin Plat. L'enfant qu'elle eut de lui reçut le prénom de son père qui s'occupa de son éducation, lui donnant  personnellement des cours de dessin et de mathématiques, si bien que dès l'âge de quinze ans il put entrer au Service des Ponts et Chaussées où il fit ses preuves.  En 1771, il participa à une expédition au volcan (Piton de la Fournaise) avec le naturaliste Philibert COMERSON et l'ordonateur de l'île Bourbon Honoré de CREMONT.  Il se rendit ensuite à l'île de France où il participa à l'aménagement de la rade du Port-Louis sous les ordres du chevalier de TROMELIN qui, séduit par son intelligence, lui fit donner des cours de perfectionnement en mathématiques et astronomie avant de le faire nomme aide-pilote. Excellent dessinateur et cartographe, il améliora grandement la cartographie des îles de l'Océan Indien.  En 1786, à 31 ans, il devint le premier membre correspondant de l'Académie des Sciences originaire de l'outre-mer et en 1787 il fut nommé ingénieur-cartographe.  En 1788 il concéda à sa mère, Niama, la jouissance d'une propriété dite de l'islet à Saint Pierre.  En 1793, son père, Monsieur GEOFFROY, plein d'admiration et d'affection pour ce fils, décida de l'adopter. Il portera désormais le nom de Jean-Baptiste l'ISLET-GEOFFROY.  En 1801 il participa à la fondation de la Société des Sciences et Arts de l'île de France (Maurice).  Ayant pris la nationalité britannique, il demeura à Maurice il oeuvra dans l'hydrographie puis se consacra à la climatologie.  Il mourut à Port Louis le 8 Février 1836 et, la même année, en Juillet, un hommage lui fut rendu par François ARAGO à l'Académie des Sciences de Paris.  

Beau témoignage de reconnaissance

de l'enfant envers sa mère et du père envers ce fils pleinement reconnu.

 

De Gaulle et ... Lawrence


Thomas-Edward alias "Lawrence d'Arabie" oui lui et je ne me serais pas risqué à associer ces deux noms si quelqu'un de plus autorisé ne l'avait déjà fait s'agissant de Malraux.

A un moment donné de leur vie, on trouve en effet chez ces deux hommes une similitude de destin si opposée que soit par ailleurs leur personnalité.

Nous savons ce que pensait de Lawrence Winston Churchill qui était son ami mais qu'en pensait de Gaulle, si tant est qu'il ait daigné se pencher sur son cas ?

Au fond on peut se poser une même question à leur sujet : Que serait devenu Lawrence, que serait devenu de Gaulle s'il n'y avait eu pour l'un l'entrée en guerre de la Turquie aux côtés de l'Allemagne en 1916, pour l'autre l'armistice capitulation de 1940 ?  Il y a fort à parier qu'on ne parlerait aujourd'hui ni de l'un ni de l'autre. Lawrence serait probablement resté archéologue de terrain en Orient, universitaire-chercheur  anonyme mais connu dans son milieu pour ses publications spécialisées.  Point.  Le colonel de Gaulle serait resté dans l'armée, sa famille, devenu quand même général et peut être auteur d'autres ouvrages techniques genre "au fil de l'épée" et "vers l'armée de métier".  Point.

Mais voilà, Lawrence fut célèbre et l'est resté pour son action auprès des Arabes dans la guerre orientale contre les Turcs au cours du premier conflit mondial et pour ce grand livre que sont "les sept piliers de la sagesse" tout comme de Gaulle le fut (mais pas seulement) pour son appel et son action depuis l'Angleterre contre l'occupation allemande et par ses remarquables "Mémoires de guerre".

Il faut donc revenir à ce moment précis où sonna pour l'un et l'autre l'heure du destin.

 

 

A la déclaration de guerre (Août 1914) T.E.L. (Thomas Edward Lawrence)  âgé de 26 ans était archéologue débutant mais prometteur sur le site mésopotamien de Karkémish (Iraq actuel) et venait de participer avec son chef de fouilles, Léonard Wooley, à une exploration du désert de Sin (partie occidentale du Sinaï) pour y effectuer un relevé topographique pour le compte du service cartographique de l'armée britannique au Caire et dont il avait été chargé du rapport.  L'ayant terminé, il chercha à s'engager comme la plupart des jeunes gens de son milieu et fut d'abord affecté au service cartographique à Londres mais, sitôt l'entrée en guerre de la Turquie aux côtés de l'Allemagne, il fut transféré à l'état major du Caire  et bientôt affecté au Bureau arabe de renseignements où il devait se faire remarquer tant par ses excentricités et son mépris des conventions militaires que par son excellente connaissance de l'arabe  et du Moyen Orient rapportée de ses voyages antérieurs à pieds  plus souvent qu'à chameau. Bien que de petite taille et d'aspect fluet, il était d'une résistance surprenante à la fatigue, la douleur, au sommeil, à la faim et la soif, tout comme les nomades du désert en fait sur lesquels il avait calqué sa manière de vivre lors de ses pérégrinations.

Les Anglais s'étaient rapprochés des Arabes du Hedjaz pour les soutenir dans leur révote contre l'occupant ottoman devenu ennemi commun moyennant promesse d'indépendance  à l'issue du conflit.  On  avait eu recours aux services du lieutenant-interprète Lawrence dès les premières entrevues avec le chérif hachémite de la Mecque Hussein et quand il se fut agi d'envoyer un émissaire anglais à Hamra en plein désert d'Arabie auprès de l'émir Fayçal, troisième fils d'Hussein, c'est encore et tout naturellement à lui que l'on pensa. Nul autre anglais n'était capable de remplir pareille mission en fait.  Au terme d'un voyage épuisant à dos de chameau et à marche forcée en compagnie de deux guides arabes, traversant le territoire de tribus encore hostiles, l'arrivée de Lawrence au camp de Fayçal et sa rencontre avec l'émir fut véritablement historique.  Les deux hommes furent impressionnés l'un par l'autre en fait : Fayçal de se trouver en présence d'un petit lieutenant mal fagotté et cramoisi mais qui, durement éprouvé par le trajet et sans avoir pris de repos était encore capable de s'entretenir avec lui en arabe sur des questions subtiles et avec à propos.  Epuisé physiquement mais restant maître de lui -  Lawrence par l'impression première et irrésistible de noblesse se dégageant de toute la personne de l'émir Fayçal en qui il vit immédiatement l'homme qu'il recherchait pour prendre la tête du mouvement.  Tel fut en cette fin d'Octobre 1916 le point de départ du ralliement et de l'entrée en guerre des tribus arabes du Hedjaz contre les Turcs avec Fayçal pour leader et Lawrence comme conseiller militaire mais aussi acteur de terrain, souvent au péril de sa vie et au prix de plusieurs blessures.  S'il avait vu d'emblée en Fayçal l'âme de la révolte, il savait que celui-ci ne pouvait pour autant se passer de lui dans une guerre "moderne".  En fait Lawrence sut parfaitement utiliser l'armée (non conventionnelle) de Fayçal partout où les Turcs ne faisaient pas le poids en dépit de leur moyens matériels et numériques, dynamitant en maints endroits la ligne ferroviaire entre Amman et Deraa, les coupant ainsi de leurs approvisionnements. Parce qu'il payait grandement de sa personne, menait la même vie qu'eux, il était presque devenu frère d'arme pour les Arabes qui l'acclamaient aussi souvent que Fayçal.

Mais "Aurens" servaient deux maîtres : fervent arabophile il avait dès le début pris fait et cause pour ce mouvement d'émancipation arabe vis à vis de l'empire ottoman et comme ce dernier venait de se ranger du côté de l'Allemagne, ce mouvement soutenu et orienté par l'Angleterre pouvait aider celle-ci puissamment à vaincre les Turcs sur le front oriental.  Elle promit donc (et par écrit) l'indépendance aux Arabes en contrepartie de leur participation à la guerre orientale mais, très vite, Lawrence s'aperçut qu'il n'en resterait que chiffon de papier une fois la paix revenue car, en réalité, les alliés s'étaient déjà secrètement entendus sur le partage des territoires libérés.  Ainsi l'Angleterre se parjurait-elle vis à vis des Arabes mais comme ceux-ci (dans leur tradition) faisaient davantage confiance à un homme qu'à des institutions, ils virent en la personne de Lawrence le garant de cette fausse-promesse. Engagé à fond à leurs côtés, il ne pouvait démissionner sans faire tout échouer aussi bien du côté anglais que du côté arabe.  Il fut donc contraint et forcé de jouer double jeu sans en  rien laisser transpirer mais au prix d'une véritable torture morale qui devait laisser sur son équilibre nerveux et psychique des séquelles irréversibles.  Du moins se jura-t'il (et il tint parole au delà de ce qu'il était possible) de tout faire pour entrainer les Arabes vers une victoire qui serait véritablement la leur tout en faisant celle des Anglais et leur confèrerait en qualité de belligérants un droit indiscutable à un part non négligeable dans le partage que prévoyait les accords Sykes-Picot.  C'est grâce à lui que Fayçal et son armée put entrer en premier à Damas libéré, trois jours avant les troupes d'Allenby et après qu'une administration provisoire ait été mise en place, non sans mal, toujours grâce à lui.  Estimant sa tâche accomplie sur le terrain, il posa alors sa démission au général Allenby, seule et unique demande qu'il fit jamais pour lui-même.

Fayçal devait  revoir son ami lors de la conférence de la paix où il fut son interprète comme plus tard à celle de San Remo.  Lawrence, dès qu'il en avait eu la certitude, l'avait mis au courant de la précarité de la promesse anglaise d'indépendance mais il ne lui en tint pas rigueur car il connaissait le coeur de Lawrence, il savait pour qui il battait, il comprit son drame personnel mais, après tout ce qu'il avait fait et subi pour la cause arabe, il estimait qu'il ne devait pas s'en tenir rigueur. 

C'est au cours de cette conférence de la paix au quai d'Orsay où il logeait avec Fayçal que Lawrence commença de rédiger les premières pages de ce qui allait devenir son oeuvre littéraire, "les 7 piliers de la sagesse" long récit d'une épopée de deux ans (1916/17) dont pratiquement tout est dit dans le mystérieux poème liminaire.  Il ne se pardonna jamais sa duplicité vis à vis des Arabes.  Il avait  rêvé  les yeux ouverts pour eux et avec eux d'un grand royaume indépendant  (la maison aux sept piliers) avec Fayçal pour souverain et, dans cette perspective, les avaient engagés dans la lutte contre les Turcs.  La paix revenue, la promesse de l'Angleterre fut réduite à peau de chagrin en dépit des protestations (compromettantes pour lui) de Lawrence. L'auto-punition qu'il s'infligea en s'engageant dans l'armée sous un faux nom et comme simple soldat  s'apparente à une sorte de suicide mental.


 

Juin 1940 : après avoir participé à la campagne de France (10 mai - 25 juin) à la tête d'une unité de chars, le colonel de Gaulle âgé de cinquante ans nommé général de brigade à titre temporaire entre dans le cabinet Paul Reynaud en tant que sous secrétaire d'état à la défense.   Il se rendra par deux fois en Angleterre demander le renvoi en France de troupes britanniques et d'une partie de la RAF et des moyens polur l'Afrique du Nord.  Il fera accepter par Reynaud le projet d'union franco-britannique présenté par Jean Monnet et approuvé par Churchill.  Il rentre de Londres à Bordeaux au moment où Reynaud n'ayant pu conjurer la défaire vient de démissionner.  Pétain va demander l'armistice.  La France capitule.  De Gaulle est un soldat par vocation ayant au plus haut point le sens de la Patrie.  Il a combattu en 14, y a été blessé et a tiré les leçons de la guerre exposant ses points de vue tranchés dans "Au fil de l'épée" et "Vers l'armée de métier". Il avait une profonde admiration pour Pétain, héros de 14, qui était le parrain de son fils Philippe.  Il fut donc cruellement déçu de sa décision de demander l'armistice.  Aussi, à peine celle ci annoncée à la radio, va-t'il franchir son Rubicon et consommer sa rupture avec le maréchal et son gouvernement.  Profitant de l'avion du général anglais Spiers, il s'envole pour Londres avec son aide de camp Geoffroy de Courcel tandis que sa famille embarque à Brest sur un cargo pour l'Angleterre.  A peine débarqué, il fonce à la BBC et dès le lendemain, 18 Juin 1940, lance sur les ondes son appel historique.  Point de départ de cette France Libre qu'il va incarner désormais.  On connait la suite, inutile d'y revenir.  Toute l'action de de Gaulle depuis Londres sera d'associer aussi étroitement que possible les forces armées et de résistance der la France Libre dans la lutte contre les Allemands pour la libération  du pays.  Avant même que les combats aient cessé il va retourner en France pour être le premier à entrer dans Paris libéré.  S'imposer aux anglais et aux américains avaient été pour lui une tâche extrêmement rude mais, aiguillonné constamment par son refus de la capitulation il avait triomphé et entrait en même temps dans l'Histoire.  Toutefois l'armistice avait d'une certaine façon favorisé ses dessiens en lui laissant le temps d'organiser la résistance  contre laquelle une armée d'occupation finit toujours par s'user. L'intervention décisive des Etats Unis dans le conflit et le débarquement allié en Normandie firent tout le reste. La paix revenue, de Gaulle ne devait faire qu'un bref passage en politique, hostile au projet de constitution et au jeu des partis, partisan d'un exécutif fort et, après l'échec de son mouvement RPF (Rassemblement du Peuple Français) il va de retirer complètement de la scène politique pour se consacrer à ses "Mémoires de Guerre" dans lesquelles il se révèle comme un très grand écrivain classique. Mais, comme l'on sait, L'Histoire devait le rattraper en Mai 1958 avec la crise algérienne.

 

Il n'est donc pas du tout incongru de faire un parallèle entre T.E Lawrence et de Gaulle, chacun dans sa guerre, et pour ce qui est des évènements déterminants ayant marqué le début de leur trajectoire respective.  Savoir aussi que nous sommes en présence de deux hommes chez qui l'action a précédé la littérature, deux hommes qui ayant joué un rôle dans l'Histoire (même si celui de Lawrence en Orient parait plus lointaine) servi en celà par les circonstances, et qui en ont témoigné ensuite.  T.E Lawrence (mort accidentellement en 1935 alors qu'il venait de quitter l'armée) ne devait pas connaître la seconde guerre mondiale à laquelle il aurait probablement participé en tant que volontaire, d'une manière ou d'une autre, et peut être pas forcément de la moindre, car son ami Churchill l'aurait sûrement relancé pour lui confier un poste important ce qu'il avait voulu faire mais ne put obtenir de lui après la première guerre mondiale. 

 

Pline le jeune dans une lettre à Tacite a écrit :

"Heureux ceux dont les actes valent la peine d'être écrits, ou les écrits la peine d'être lus ;  plus heureux encore ceux auxquels il est donné d'allier les deux."


Nous en avons ici deux exemples.

 

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20 janvier 2012 5 20 /01 /janvier /2012 16:30

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"15000 miles in a ketch" by Raymond RALLIER du BATY

 

Le livre lui même est une aventure. 

En 1910 le prince Roland BONAPARTE, président de la Société de Géographie, avait salué dans l'  "Illustration" le voyage aux Kerguelen de Raymond et Henri RALLIER du BATY et leurs quatre compagnons par ses mots : " Vous êtes des aventuriers du XVIème siècle égarés au XXème."  Mais en France nul éditeur ne s'intéressa à leur formidable aventure et aux carnets de bord qu'en avait rapportés Raymond R du B et ce sont les Anglais en la personne du journaliste Philip GIBBS qui le contacta, l'invitant à venir à Londres où un garni serait mis à sa disposition pour y rédiger - mais en anglais - sa narration.  L'année suivante paraissait aux éditions Nelson "15.000 miles in a ketch" by Raymond RALLIER du BATY, récit circonstancié du périple du "Jean Baptiste Charcot" et  de ses six hommes d'équipage, partis de Boulogne sur Mer pour Melbourne via les îles Kerguelen où ils séjournèrent quinze mois. Le succès fut immédiat tant à Londres qu'à Liverpool et Southampton, sans qu'aucun éditeur parisien ait crû bon de le traduire et éditer en français.  L'aventure et le nom de ces vaillants marins finirent donc par être oubliés dans leur propre pays.  Ce n'est qu'en 1990 qu'un exemplaire de la parution anglaise découvert par hasard chez un bouquiniste par un marin breton (Patrick CUDENNEC) tomba entre les mains d'un lecteur qui en comprit tout l'intérêt, le faisant traduire et publier aux Editions Maritimes et d'Outre-Mer (Rennes), division des Editions Ouest-France, collection "longs cours".  Justice était enfin rendue à ce grand livre de la littérature de mer, à son auteur et à ses courageux équipiers.


Or nous avons la chance d'avoir dans les rayons de notre Médiathèque "bénédictine" un exemplaire de cette édition en français intitulée "Aventures aux Kerguelen".  


Je viens de le lire.  J'en reste sous le charme.


L'auteur prévient son lecteur (et même s'excuse auprès de lui) qu'il a écrit ce livre en modeste marin, sans aucune prétention littéraire, s'attachant essentiellement à rapporter les choses vues et les évènements vécus, livre se voulant être tout autant celui de son équipage auquel il rend le plus grand hommage. Personnellement - et bien que j'aurais aimé le lire dans sa version originale c'est à dire en anglais - je trouve cette appréciation bien trop modeste, le mettant à la hauteur d'un Daniel de Foe ou d'un Washington Irving.


Raymond RALLIER du BATY était né en 1881 à Lorient, deuxième fils d'une bonne famille bretonne dont le père était capitaine de vaisseau et l'oncle amiral (un ancêtre, Toussaint-François, avait été maire de Rennes pendant 37 ans sous Louis XV). Tombé dedans en quelque sorte.  Après de bonnes études classiques chez les Jésuites, ses parents le voulaient magistrat (ayant déjà leur premier garçon, Henri, engagé dans la Marine nationale) mais depuis l'enfance Raymond avait la mer pour objectif, voire obsession. A dix huit ans, comme son père lui faisait remarquer que c'était un peu tard pour lui d'entrer dans la Marine nationale, il répliqua que çà ne l'était pas pour la Marine marchande.  Or il existait à l'époque comme un fossé entre ces deux marines (tenant à ce mot de "marchande") d'où la désillusion du père. Raymond fit néanmoins son service militaire dans la marine à bord du cuirassé "Brennus" sur lequel il doubla le Cap Horn. Puis, après avoir obtenu son diplôme d'officier de marine marchande, il cherchait à s'engager sur un navire quand un article de presse attira toute son attention.  On était en 1903, année où le commandant Jean-Baptiste CHARCOT (qui était aussi médecin) préparait une expédition polaire.  Usant de sa plus belle plume, Raymond proposa ses services mais on le trouva trop jeune, pas assez expérimenté.  Qu'à celà ne tienne, faisant jouer les relations de son oncle amiral il finit par se faire accepter à bord du "Français" comme simple matelot. Ce voyage aux confins des terres australes devait s'éterniser deux ans au cours desquels Raymond R du B se révéla parfait coéquipier, de toutes les corvées comme de toutes les missions, curieux de tout, inventif, enthousiaste.  CHARCOT l'avait tout de suite remarqué et devint par le fait son mentor.


De retour en France, il entra dans la Compagnie Transatlantique et en 1907 fut reçu capitaine au long cours.  Mais en fait il ne se voyait pas naviguant dans les fonctions ordinaires de ce poste.  L'aventure maritime vers les terres lointaines l'attirait plus que jamais. Il rêvait de monter lui même une expédition vers ces terres australes qu'il avait déjà entrevues, inhabitées mais dont on pouvait tirer profit à l'instar des Anglais aux îles Malouines. Il s'informa, se renseigna tout azimuth, parvint à convaincre son frère Henri de participer à son projet d'expédition, entre en contact avec les frères Bossière dont j'ai déjà parlé à propos des TAAF et à qui l'état français venait d'accorder une concession de cinquante ans sur les îles Kerguelen, Crozay, St Paul et Amsterdam. Il n'entendait pas du tout faire de ce voyage une simple escapade mais faire oeuvre utile en participant avec ses moyens et à sa manière au progrès de la géographie et de la science, en fidèle héritier du commandant CHARCOT.  D'ailleurs celui-ci usera de son influence auprès des organismes d'état pour qu'il soit commandité par eux ainsi que par la Société de Géographie en la personne de son vice-président, Jules GIRARD.

En attendant il lui fallait trouver un bateau, à sa convenance et aussi celle de sa bourse.  Il partit donc écumer les ports à la recherche de la perle rare.  Ce sera le "Sacré Coeur de Jésus" un ketch de vingt mètres, passablement endommagé mais à la coque saine, nécessitant évidemment de couteuses réparations au financement desquelles la famille RALLIER du BATY allait contribuer.  

Une fois remis en état, Raymond voulut débaptiser le ketch pour l'appeler du nom de "Jean Baptiste CHARCOT" en reconnaissance du disciple pour son maitre.

C'est en septembre 1907, de Boulogne sur Mer, port d'attache de l'ex "Sacré Coeur de Jésus", que s'élança le "J.B. Charco" avec à son bord :


Henry RALLIER du BATY, 27 ans, breton, capitaine

son frère cadet Raymond, 25 ans, breton, second

Jean BONTEMPS, 43 ans, basque, bosco

Léon AGNES, 22 ans, normand, matelot

Eugène LAROSE, 18 ans, normand, matelot,

Louis ESNAULT, 16 ans, normand, cuistot

 

plus un chien et un chat.

 

pour une navigation qui devait durer près de deux ans (jusqu'à fin Juillet 1909).

 

Un bateau petit mais très robuste, un équipage réduit à l'équilibre des quarts de jour et de nuit mais à l'étroit, des vivres en suffisances pour atteindre les terres australes.  L'expédition ne payait pas vraiment de mine mais, après un incident lors d'une escale imprévue à Brixham sur la côte anglaise, ils commencèrent à tailler une belle route vers le sud, vers Rio de Janeiro qu'ils atteignirent d'une traite et sans avoir croisé d'autre bateau qu'un grand voilier, l' "Australia" au passage de la ligne.

 

Ils restèrent 12 jours à Rio pour se réapprovisionner en eau et fruits frais avant de repartir le 1er janvier 1908 cap au sud-est direction les îles Tristan da Cunha.  Celles-ci (la Grande Île, l'île Inaccessible et l'île Nightingale) font partie d'une chaine sous-marine partageant l'Atlantique parsemée de volcans, ceux de Tristan da Cunha, Sainte-Hélène, Ascension et Saint Paul sont éteints depuis très longtemps mais en sommeil seulement à Ténérif et aux Açores, toujours en activité en Islande.  Tristan da Cunha fut découverte par le Portugais du même nom au XVIème siècle.  Les premiers à y séjourner furent des phoquiers.  En 1815 les Anglais en prirent possession au nom du roi George III en tant que dépendance du Cap de Bonne Espérance et y établirent une garnison pour prévenir toute tentative de faire évader Napoléon Ier retenu prisonnier sur l'île Sainte-Hélène.  Quand celle-ci leva le camp après la mort de l'Empereur, quelques hommes préférèrent rester sur place et y furent bientôt rejoints par les naufragés d'un bateau anglais jeté par la tempête sur l'île Inaccessible.  Ainsi se constitua le noyau d'une population de fermiers, éleveurs de moutons et de chèvres, de pêcheurs, d'apparence nullement misérable selon Raymond R du B.  

Ayant repris la mer le 28 Janvier 1908 et une fois passé le méridien du Cap, le "J.B. Charcot " eut à affronter une succession de très mauvais temps, de tempêtes énormes qui le mirent quelque peu à mal tout en tenant bon pourtant grâce à la maîtrise des hommes d'équipage mais le brave chien du bord (Patrick) lancé par dessus bord par une lame devait périr noyé sous leurs yeux, presque une tragédie qui les plongea dans la tristesse. Progressant vers l'est, ils arrivèrent enfin le 4 mars 1908 en vue du pic de Croy dominant les îlots rocheux appelés "îles Nuageuses" par Cook et faisant partie des Kerguelen. 

Au fur et à mesure qu'ils s'en rapprochaient, Raymond R du B songeait non sans appréhension aux jours qui allaient suivre quand ils seraient à terre, seuls, livrés à eux mêmes pour leur subsistance, face à de nouveaux dangers.  Son équipage avait été irréprochable jusque là mais allait-il lui rester aussi fidèle, privé de compagnie, de distraction, quand il aurait peut-être à repousser les démons de la mélancolie voire de la folie poussant au meurtre ou au suicide.  Autre souci : l'aventure qu'allait être pour eux la chasse aux phoque, comment allait-il s'en tirer alors qu'ils comptaient absolument sur elle pour en tirer un revenu avant de rentrer en Australie.  Rechercher les endroits propices tout en assurant un bon mouillage au bateau par ces temps exécrables si fréquents aux Kerguelen. 

Et pourtant le petit groupe d'hommes demeura soudé, solidaire, tenace envers et contre tout, jusqu'à parvenir enfin à remplir la cale du "JB Charcot" de tonnelets d'huile de phoque de première qualité, extraite de leurs mains, de leur sueur, de leurs souffrances, eux qui n'étaient pas du tout aguerris à ce genre de chasse.  Raymond R du B narre dans les détails ce qu'est cette chasse aux phoques et aux éléphants de mer à l'aide de massue à embout de fer, extrêmement dangereuse face à ces masses énormes qui ne reculent jamais et qu'il faut frapper à la tête en prenant garde à leurs redoutables mâchoires.  Le sang coule à flot des blessures, rougissant le sable noir et les galets. Et une fois le nombre de bêtes abattus faut-il encore les dépecer, découper le lard en larges bandes destinées à être chauffées dans une grande cuve pour les transformer en huile.  L'odeur est de plus épouvantable, s'insinuant partout.  Pour le chauffage de ces cuves on trouve aux Kerguelen des filons de charbon à fleur de terre, de plus ou moins bonne qualité, de sorte que les six hommes devaient régulièrement s'armer de pics et de seaux pour en faire provision.  Pas de problème de nourriture grâce aux oiseaux marins et à leurs oeufs, aux lapins, aux moules, aux poissons et au "chou des kerguelen" qu'il faut faire bouillir en deux fois et dans deux eaux pour l'attendrir.  Pas d'avantage pour l'eau douce que l'on trouve partout.  


A côté de ces activités de "phoquiers", Raymond et son frère Henri menaient des expéditions de découverte à travers l'archipel, retrouvant les traces d'occupation d'anciens naufragés. Ces sorties sur une mer toujours mauvaise faillirent plus d'une fois se solder tragiquement mais leur bonne étoile veillait et peut être le "Sacré Coeur de Jésus" dont le bateau avait d'abord porté le nom. 


Et puis le jour arriva où ils aperçurent le panache de fumée d'un steamer.  Après plus de dix longs mois de solitude c'était pour eux comme un message d'humanité, de bonheur, si brutalement en fait qu'ils en furent sur le coup  frappés de stupeur. Enfin ils allaient pouvoir manger autre chose, boire autre chose, se laver convenablement, fumer (ils étaient à court de tabac, une torture pour certains) parler à d'autres gens,  bref redevenir civilisé.  Ce navire était la "Jeanne d'Arc "  commandée par un Norvégien transportant en pièces détachées une station de fonte de graisse de phoque et de baleine. Or, à son  départ pour les Kerguelen, il avait été informé de la présence (probable) des Français du "JB Charco" et les parents des frères Rallier du Baty lui avaient remis une lettre pour eux. Le "JB Charco" à son mouillage avait déjà été repéré par la "Jeanne d'Arc" mais celui ci, vu l'état de la mer et l'étroitesse de la passe,  avait poursuivi vers un havre plus approprié.

Un autre navire, un brick français, la "Carmen", arriva entre temps si bien que du coup la compagnie n'allait plus manquer aux six hommes du "J.B. Charcot". 
Après avoir fait un aller-retour jusqu'à Durban, la "Jeanne d'Arc" avait ramené un Français du nom de Bossière, celui-là même qui avait reçu du gouvernement français une concession de cinquante ans aux Kerguelen.


C'est le 1er Juin 1909 que le "J.B. Charcot" chargé de ses précieux barils d'huile de phoque allait lever l'ancre et hisser les voiles, cap sur l'Australie.  Mais Henri, l'aîné, ne fut pas du voyage cette fois, souffrant depuis quelque temps d'une sorte de scorbut, trop malade pour affronter les risques d'une longue traversée dans un si petit bateau. Il allait être rapatrié en France à bord de la "Jeanne d'Arc" qui devait repartir quelques jours plus tard.  


Le 25 Juillet 1909 le "J.B. Charcot" entrait en baie de Melbourne et ainsi s'achevait l'aventure, à 15.000 milles de la France, près de deux ans après le départ de Boulogne sur mer.  Les hommes d'équipage étaient bien entendu très impatients de rentrer en France et, une fois payé sur la vente bon prix des barils d'huile, Raymond les fit embarquer sur le bateau postal  français, le "Nera" , mais lui devait rester encore cinq mois en Australie afin de négocier la vente de son bateau avant de regagner la France à son tour. Après avoir vécu si longtemps et si étroitement avec ces hommes, affronté avec eux tant de périls, enduré tant de souffrances, mais connu aussi tant de moments exceptionnels, cette séparation fut douloureuse et d'un coup Raymond se sentit très seul.  Autre séparation pénible celle de son vaillant petit ketch et je vais ici le citer dans les dernières pages de son livre où il rend, tant au bateau qu'à ses hommes, le plus bel hommage :


"... Je ne les ai pas revus depuis mais nous nous écrivons de temps en temps.  Ces braves garçons, durs au travail et à la souffrance, m'ont tous servi fidèlement, avec un courage indomptable.  Ils ont été mes camarades pendant près de deux ans.  Nous avons traversé ensemble bien des périls et vu la mort de près une bonne vingtaine de fois.  Bontemps, Agnès, Larose, Esnault, vous êtes les héros de mon histoire. Je penserai toujours à vous avec affection et gratitude.  Grâce à ce livre, vos noms et vos actions sont à jamais inscrits au tableau d'honneur.  Mes bons amis, je vous quitte et où que vous soyez sur les vastes mers je vous serre chaleureusement la main.

... Mais personne ne voulait du "JB Charcot" en dépit de sa bravoure et de son âme généreuse.  Celà me faisait mal au coeur de le mettre en vente après tant de loyaux services au milieu d'effroyables tempêtes et de baies constellées de récifs.  Quand je parvins à le vendre, j'en tirai un prix misérable pour un si brave bateau.  Cher "JB Charcot", je ne sais pas où tu navigues aujourd'hui mais je me souviendrai de toi toute ma vie.  Je connais la moindre de tes membrures, le moindre grain de ton bois.  Je t'ai durement éprouvé et jamais tu n'as failli.  Mon fantôme et celui d'Henri et de l'équipage hantent ta petite cabine, ton pont étroit et tes entrailles.  Mon cher bateau, la Providence fasse que tu sois manoeuvré par des hommes qui t'aiment comme nous t'avons aimé.  Parfois je pense que nous les hanteront qui qu'ils soient et où qu'ils aillent et que parfois ils entendront la faible complainte d'un accordéon comme lorsqu'Agnès jouait le soir à l'île de la Désolation ou le bruit du moulin à biscuits de Larose et ma voix et celle de mon frère quand nous parlions assis dans la petite cabine la carte de Kerguelen étalée devant nous."

 

Ce double hommage aux hommes et au bateau est émouvant dans sa sincérité, même pour le terrien que je suis mais ayant une admiration sans borne pour ces hardis navigateurs.  Ce sont en réalité des hommes à part car, comme le disait Socrate : "il y a trois sortes d'hommes : les vivants, les morts et les marins."

 

Que devint Raymond Rallier du Baty une fois de retour en France alors qu'il venait d'avoir trente ans ? Il allait se passionner pour les exploits des pionniers de l'aviation, fréquenta l'école d'Henri Farman à Toussus le Noble et obtint son brevet de pilote.  Il ne continuait pas moins de rêver à un nouveau voyage au long cours qu'il devait d'ailleurs entreprendre grâce à son sponsor, Jules Girard.  Il put se faire construire un autre bateau, "la Curieuse",  un peu plus petit que le précédent, mais doté d'un moteur.  Son programme était ambitieux, s'étendant sur cinq ans, tour du monde d'Ouest en Est via l'Atlantique, le Cap de Bonne Espérance, le sud de l'Océan Indien, l'Australie, le Pacifique et le tout nouvellement inauguré canal de Panama.  Départ prévu : Septembre 1913, retour en 1918.  Mais outre quelques désagréments avec son équipage, le voyage devait s'interrompre en Australie en Septembre 1914, la guerre étant déclarée et Raymond rappelé pour faire son devoir.  Il avait quand même eu le temps de parfaire la topographie des Kerguelen et de dresser la première carte des lieux digne de ce nom.  Ses finances étant à plat, il dut vendre son bateau à l'encan pour payer l'équipage et le faire rapatrier, même sort que le "JB Charcot" en définitive. 


Cette triste fin du voyage, le bouleversement de la guerre 14/18, la mort de son frère Henri après avoir été gravement blessé au front, affectèrent durement son moral.  Mobilisé lui même, il fut versé au centre d'aviation maritime de Dunkerque, effectuant des patrouilles dans le Pas de Calais et la mer du Nord en petit hydravion biplan à coque plate.  Il devait participer au bombardement d'Ostende.  Devenu ainsi un spécialiste aéronaval, il fut après la guerre attaché à l'Office Scientifique et Technique des Pêches Maritimes (OSTPM) effectuant de nombreuses missions dans le Golfe de Gascogne, sur les côtes d'Espagne, du Portugal, du Maroc, Mauritanie, aux Açores, Canaries, Terre Neuve.

 

Il mourut de sa belle mort comme l'on dit, le 7 Mai 1978, à l'âge très avancé de 97 ans, inhumé au cimetière de Kerdeff à Locmiquélic dans le Morbihan.

 

2 -

 

"Heurs et malheurs du thé Bourbon"


L'histoire du thé à l'île de la Réunion est partie de grands espoirs malheureusement vite déçus. Sa culture, testée en 1955 puis lancée en 1957 dans des zones des Hauts de l'île encore enclavés (Plaine des Palmistes, Grand-Coude) va durer moins de quinze ans.

Si l'on remonte aux origines anciennes, des pieds de thé sauvage auraient été découverts dans l'île puis des plants furent importés par un particulier , un certain Rochefeuille, mais c'est au Crédit Foncier Colonial que l'on doit l'essai le plus important avec deux plantations, l'une au Baril (Saint-Philippe) l'autre au Bernica (Saint Paul) et plus tard à Bagatelle et Menciol dans les hauts de Saint-André.  Cette culture nouvelle nécessitait une main d'oeuvre nombreuse et répondait tout à fait au plan de développement des hauts de l'époque prôné notamment par Jean De Cambiaire, directeur du Crédit Agricole.  Deux coopératives furent créées dans les années soixante à la Plaine des Palmistes (inaugurée par Michel DEBRE) puis  à Grand-Coude produisant le thé "Bourbon", thé noir qui, analysé par les experts de Londres fut classé cinquième au monde, comparable au Ceylan. A savoir que le thé "noir" vient de la même plante, camellia sinensis,  que le thé "vert" ou le thé "blanc", seule change la cueillette (on ne prélève que les deux dernières feuilles et le bourgeon pour le thé "blanc") et les opérations de torréfaction pour le thé "vert" et la fermentation pour le thé "noir".  En 1970, la production atteignait 70 tonnes mais avec un coût de la main d'oeuvre à la Réunion, Département français d'Outre Mer, qui n'était pas compétitif par rapport aux autres pays producteurs comme l'île Maurice, les pays africains et asiatiques, le rendement s'avérant  aussi insuffisant même si la qualité était là.  Il y eut aussi des abus notoires quant à l'usage de subventions.  En 1972 on paya les mêmes exploitants qu'on avait prféalablement payés pour arracher au profit du thé leur géranium pour le replanter cette fois à la place du thé.  En 1973 les deux coopératives mirent la clé sous la porte. Les jolis paquets de "thé bourbon" se trouvèrent encore présents quelques années dans les boutiques avant qu'ils n'en disparaissent totalement.

Pour finir, trois remarques concernant le thé :

- c'est une culture non invasive, autrement dit ce n'est pas une peste végétale, nul oiseau ne transporte ses lourdes graines au delà du périmètre planté. 

- Les théiers sont des arbres en fait mais si on les voit de la taille d'un arbuste c'est parcequ'ils sont rabattus pour faciliter la cueillette (comme pour l'ylang ylang) et taillés en table.  Un pied de thé qu'on laisse pousser peut atteindre vingt mètres.

- La cueillette est l'étape cruciale pour la qualité : cueillette "impériale" (le top) où l'on n e prélève que le pekoe (c à d le bourgeon terminal, la jeune pousse enroulée sur elle même, plus une feuille) -  cueillette "fine" où l'on prélève le pekoe plus 2 feuilles - cueillette "normale" où l'on prélève le pekoe plus trois feuilles (voire plus).  Les feuilles du bas sont moins riches en caféïne et tanin et d'un goût moins raffiné. 

Cette cueillette se fait toujours le matin quand les feuilles sont les plus fraiches et à la main, généralement par des femmes, bien qu'elle soit devenue mécanisée au Japon et en Géorgie.


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5 janvier 2012 4 05 /01 /janvier /2012 14:12

Il y a eu 50 ans tout juste le 20 Décembre que la première mission scientifique menée par les TAAF (Terres Australes et Antarctiques Françaises) débarquait aux îles Crozet.  Ils étaient treize derrière leur chef, Alfred FAURE, dont le nom a été donné à la base scientifique ouverte en 1964 sur l'île de la Possession.  Parmi eux Michel CHAPUIS, 70 ans, un des quatre survivants du groupe, qui vient d'embarquer  sur le "Marion Dufresne" au départ de la Réunion profitant de sa dernière rotation de l'année 2011. Au nom de ses camarades aujourd'hui disparus ou trop âgés pour affronter le voyage, il emporte avec lui une plaque commémorative de ce cinquantenaire qui sera apposée là bas, voyage qui va lui rappeler ses vingt ans, non sans émotion.  Topographe de formation, Alain CHAPUIS avait été appelé sous les drapeaux pour servir à Madagascar et c'est de la Grande Île qu'il était parti avec ses camarades à bord du "Galliéni" pour arriver le 20 Décembre 1961 après plus de 8 jours de mer sur cet archipel au climat très rude des "quarantièmes hurlants" avec trente tonnes de matériel destinées à l'établissement d'un camp de base.  Résidant à Saint-Palais-sur -mer (Charente Maritime), il rêvait depuis longtemps de pouvoir revenir un jour là bas.  Y aller avait déjà été pour lui une chance extraordinaire.  Y retourner cinquante ans après lui paraissait inimaginable.  Nous allons donc souhaîter à ce monsieur bon voyage et bon séjour sur la base scientifique Alfred FAURE de l'île de la Possession, archipel des Crozet, sur les pas de sa jeunesse.

Ce fait divers qui, évoquant le grand sud austral, nous apporte la fraicheur dont nous aurions bien besoin en ce moment, est l'occasion de rappeler sommairement ce que sont exactement les TAAF.

Elles comportent 4 districts:

- la Terre Adélie, partie française du continent Antarctique, à 7660 Kms de la Réunion, avec sa base permanente Dumont d'Urville créée en 1958

- les îles Crozet à 2800 kms de la Réunion, au nombre de vingt dont : l'île aux cochons, l'île des apôtres, l'îles des Pingouins, l'île de la Possession où se trouve la base permanente Alfred FAURE déjà citée et l'île de l'Est.  L'archipel tire son nom de Julien Crozet qui était le lieutenant de Marion Dufresner.

- les îles Kerguelen, appelées par Cook "îles de la désolation", au nombre de trois cents environ, à 3400 Kms de la Réunion, avec sa base permanente créée en 1950 à Ports-aux-Français (île de Kerguelen). Elles furent découvertes par Kerguelen de Trémarec en 1772. (Ker Guelen en breton maison du houx)

- l'île d'Amsterdam à 2880 Kms de la Réunion, déjà découverte par des compagnons de Magellan en 1522, redécouvertes par Dupeyrat en 1843.

- Île Saint Paul découverte en 1559 par des Portugais ne faisant que 7Km2, in habitable en raison des conditions atmosphériques épouvantables et quasi permanentes.

 

En 1924, ces possessions françaises de l'Antarctique furent rattachées administrativement à Madagascar.

En 1955 elles devinrent territoires d'outre-mer français.

En 1959, le traité de l'Atlantique signé à Washington annula pratiquement les effets de la prise de possession française en réservant l'Antarctique aux expéditions scientifiques internationales et en y interdisant l'exploitation industrielle et commerciale hormis les zones de pêches règlementées (baleines, légines, flétans, ...)

En 1972, elles furent associées au Marché Commun en raison des pêcheries.

Ces territoires sont gérés administrativement par un Administrateur Supérieur qui est le Ministre des DOM.TOM (dont le représentant local est le Préfet de la Réunion) assisté d'un Secrétaire Général, d'un Conseil Consultatif de sept membres nommés par le Gouvernement pour cinq ans et ayant pour Président le Contrôleur Général des Armées, d'un Comité scientifique de douze membres rattachés à l'Institut Français pour la Recherche et la Technologie Polaire (IFRTP) et enfin d'un Comité de l'Environnement.

La recherche en Antarctique porte sur les rayons cosmiques, l'ionosphère, la radio activité naturelle, la physique-chimie de l'atmosphère, la glaciologie, la météo, la seismologie, la biologie terrestre et marine, et aussi station de réception des satellites.

La zone économique est desservie par deux navires : le "Marion Dufresne" vers les Kerguelen, Crozet, St Paul et Amsterdam, "l'Astrolabe" vers la Terre Adélie.  En outre,  l' "Albatros" est chargé de la surveillance militaire.  Quant à "la Curieuse" c'est une vedette océanographique de 25 mètres à disposition.


Pour terminer je vais citer "Léone, pages de vie à Kerguelen" de Françoise SYLVESTRE (édition Orphie, collection "autour du monde") qui y a vécu à plusieurs reprises l'équivalent de plus d'une année :

"... Les paysages de Kerguelen sont décrits par certains comme monotones.  Pourtant, où trouver réunis sur une même terre et à moins de vingt kilomètres de distance à vol d'oiseau, une calotte glaciaire vierge, des "baignoires" naturelles d'eau qui jaillit du rocher à près de 70°, des grèves balayées par l'océan où les galets sont calcédoines, bleues, vertes ou orangées.  Ou pouvoir observer le même jour, éloigné de quelques heures de marche, une harde de rennes buvant au bord d'un lac, un albatros, ses grandes ailes déployées, en train de nourrir son petit au n id, un harem d'éléphants de mer, des manchots royaux ou gorfous rassemblés en rockeries aussi bruyantes que puantes, et tous les jours par milliers des sternes, pétrels de toutes sortes, moutons, mouflons, lapins, chats et souris.  Et tous qui observent l'observateur que vous êtes.  Préservé par son isolement, réserve naturelle authentique, Kerguelen est vraiment le royaume d'une faune d'exception, le paradis des ornithologues, biologistes, géologues et écologues, l'observatoire privilégié des météorologistes et géophysiciens.  Un creuset d'importance planétaire pour tous les scientifiques de la mer, de la terre et de l'espace.  Et pourtant, seulement une île, minuscule dans l'immensité de l'océan.

 

... Ce qui est fantastique à Kerguelen c'est la permanente réciprocité et complémentarité de tout et de tous.  Du chef de district au boulanger, du manoeuvre ou garagiste au médecin, tout le monde a besoin de tout le monde en donnant l'impression de n'avoir besoin de personne.  Du coup se crée un climat propre à l'archipel.  Presque toute notion de hiérarchie semble avoir disparu alors qu'on est ici entre militaires et fonctionnaires.  Terre de paradoxes."

 

Le livre de Françoise SYLVESTRE évoque l'entreprise des frères René (né en 1857) et Henry (né en 1859) BOSSIERE, aventuriers dans l'âme, fils d'un armateur à la pêche baleinière du Havre, le dernier en fait.  Ils couraient les ports pour négocier l'huile et les fanons de baleine qui se vendaient très cher à l'époque ainsi que des peaux de phoque provenant des Kerguelen.  Prenant la suite de leur père, l'aîné René en devint le patron en 1882. Lors d'un séjour en Amérique du Sud, il découvrit en Patagonie l'élevage extensif du mouton qui se pratiquait aussi aux îles Malouines, ce qui devait lui donner des idées. En 1893 se trouvant à Londres les deux frères avaient ouï dire que les Anglais s'intéressaient sérieusement à l'archipel des Kerguelen pour y implanter un dépôt de charbon (dont un Anglais, Ross, avait trouvé trace) pour leurs bateaux à vapeur sur la route de l'Asie, Australie, Nouvelle Zélande.  Rentrés en France, ils en avaient aussitôt informés les autorités gouvernementales en se proposant d'aller établir là bas une colonie française pour couper l'herbe sous le pied aux Britanniques.  Ils purent ainsi obtenir une concession de cinquante ans sur les îles St Paul et Amsterdam, Crozet et Kerguelen, dans le but d'y élever des moutons et d'y pratiquer la chasse à la baleine et à l'éléphant de mer, fondèrent une nouvelle société, la Compagnie des îles Kerguelen, et firent construire une station baleinière et tout un village en bois pour y faire venir des colons bergers et des pêcheurs bretons. Ils eurent aussi l'occasion de rencontrer dans le coin Adrien de GERLACHE, lieutenant de marine belge originaire d'Hasselt qui s'était porté volontaire pour l'expédition en Antarctique du Suédois NORDENSKJÖLD et qui devait plus tard monter sa propre expédition.  Mais la première guerre mondiale devait mettre à mal tous leurs projets qui, faute de financement, partirent à vau l'eau. Les activités reprirent après guerre mais pour quatre années seulement, les pêches se faisant plus rares. De plus une épidémie de béribéri vint décimer une partie de la population. En 1931 les derniers colons survivants furent rapatriés en France et ces territoires du bout du monde redevinrent inhabités. Mais ils devaient bientôt s'ouvrir au domaine scientifique et y prendre toute l'importance que l'on sait.    

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6 décembre 2011 2 06 /12 /décembre /2011 14:33

Séguret (ségur en occitan pour sécurité) est un petit village du Vaucluse, proche de Vaison-la-Romaine, au pied des Dentelles de Montmirail.  Le site est très ancien puisqu'il remonterait à la Préhistoire, connu sous l'époque gallo-romaine, le village actuel s'étant édifié au cours des XII - XIIIème siècles.  A flanc de coteau, ceint de remparts et dominé par les ruines du château féodal, il a conservé de belles constructions moyenâgeuses : porte Reynier, beffroi, fontaine comtale, maisons anciennes de la rue des Poternes, église romane Saint Denis.  De la corniche des remparts et bien sûr du haut de la colline du château la vue s'étend sur toute la plaine du Comtat-Venaissin et jusqu'aux Cévennes. Les armoiries de Séguret rappellent (par une tour) son caractère fortifié et (par des clés de Saint Pierre) qu'il fit partie des états pontificaux.  Ce n'est qu'en 1793 que le village fut rattaché à la France et au département du Vaucluse.


Séguret conserve une vieille tradition viticole.  Le vin de Séguret est moins connu que le Gigondas, rival du Châteauneuf-du-Pape, mais sa confrérie du Gouste-Séguret remonte fort loin et eut cette particularité d'avoir connu une femme à sa tête.

 

Autre tradition non moins vivace, celle du mystère de la Nativité, "Li Bergié de Séguret" transmis oralement de génération en génération et toujours interprété par les gens du village avant la messe de minuit.  Les dialogues et chants en occitan seraient l'oeuvre de Nicolau SABOL qui était chantre à la cathédrale Saint Trophime d'Arles.

 

Vous allez me dire que Séguret est très loin de la Réunion, oui mais beaucoup moins dans mon souvenir de François MORENAS qui en était natif et qui, avec Claude, y organisait des veillées de Noël.


A Séguret, comme ici, ailleurs, et de par le monde,

  même et unique A(E)vènement.


Joyeux Noël à TOUS !


 

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