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18 juillet 2020 6 18 /07 /juillet /2020 11:06

Scolarisé à 7 ans, juste après la guerre (mais sachant lire et écrire) et après une "primaire" tout à fait correcte et même un passage réussi de 7ème en 6ème, je m'étais retrouvé au collège Saint-Grégoire quai Paul Bert à Tours. 

Je ne devais y passer qu'une seule année et ne plus fréquenter d'autre établissement scolaire que pour passer le Certificat d'Etudes Primaires (CEP) à N.D. La Riche.

Entre temps, en partie pour raison de santé, j'étudiais à la maison par correspondance. 

Si j'ai connu durant cette unique année collège l'auteur du livre dont je vais parler, il n'avait pas pour autant été mon professeur, il faisait les grandes classes (troisième, seconde et première).

Mais j'eus l'occasion de le revoir plusieurs années après alors qu'il venait juste de rentrer de son périple à scooter de Tours à Ceylan (Sri Lanka aujourd'hui). Si, n'ayant pas été son élève, il ne sut me reconnaitre, de lui par contre il m'était resté un souvenir particulièrement vivace.

L'abbé Claude Balois (s j) puisqu'il s'agit de lui était un gaillard de plus d'un mètre quatre vingts, taillé en athlète, encore très jeune, la trentaine à peine.  Sous la soutane on lui devinait un coffre et des bras de lutteur. Avec celà une figure joviale, un peu boutonneuse, toujours épanouie. Il était natif du Nord, de Tourcoing, où il avait fait ses études. Après son ordination il avait été nommé professeur de géographie au collège Saint-Grégoire de Tours tenu par les Jésuites.  Il avait une soeur qui s'était mariée à un fabricant de bonneterie près de Tours et qui se trouvait être un des fournisseurs de mon père d'où cette rencontre dont j'ai parlé plus haut. Ainsi avait-il une certaine attache tourangelle.

Il était extrêmement populaire et participait souvent à nos jeux et sports (foot, basket) à la récré d'après-déjeuner où nous étions toutes classes confondues.

Je n'étais pas transcendant en sport pas plus qu'en latin (!...) mais j'étais le seul des premières classes (6ème/5ème) à savoir évoluer à l'intérieur d'une roue de gymnaste. Sait-on encore ce que c'est aujourd'hui? On s'y plaçait le corps en X s'y tenant des pieds et des mains par des poignées et, par deux trois balancements, on lançait la roue. Ce n'est pas tant l'effort physique que ça représentait que de savoir faire suivre les pieds la tête en bas pour s'y maintenir dans la même position et, bien entendu, le fait d'oser se lancer.  J'en tirais une petite fierté. 

La presse locale (Nouvelle République du Centre Ouest) à laquelle mes parents étaient abonnés avait fait état, d'abord de son projet pour les vacances scolaires de l'année 1954, puis en termes élogieux de son retour de Ceylan et de la parution de son livre intitulé "Namo Lanka" (Salut, Ceylan !) édité l'année suivante par la maison Mame de Tours.

  les tontons scooteurs • Afficher le sujet - VIEUX LIVRES / LES ...

 l'abbé Claude Balois à son départ place du Palais à Tours en compagnie du Club Scootériste de la ville.

Tel qu'on le voit sur la photo ci-dessus datant du 6 Juillet 1954, son "Lambretta" lourdement chargé de deux jerrycans de carburant sur l'avant plus un gros coffre à bagages aménagé sur l'arrière, muni de multiples visas, il se lançait sur un parcours de 15.000 kilomètres à travers la France, l'Italie, la Yougoslavie, la Grèce, la Turquie, la Syrie, l'Irak, l'Iran, le Pakistan et l'Inde, enfin Ceylan où il devait arriver le 26 septembre de la même année.  Bien entendu il fit le trajet retour par avion, trop tard pour être présent au  collège le jour de la rentrée mais aussi trop fatigué par une dysenterie chopée en chemin.

Voici la page de couverture de son récit passionnant que j'avais acheté et qui demeura longtemps dans la bibliothèque familiale. 

Front Cover
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Il commençait par cette considération sur sa province d'origine : "Pourvue de courage, de travail et d'impôts, ma province natale ne connait ni l'insouciance, ni le ciel pur ni les vacances." (sic) et s'il n'avait renoncé lui-même ni aux soucis ni au courage que lui avait légué sa naissance flamande, il avait en revanche cherché chaque année les pays de ciel pur et c'est vers le Sud qu'à chaque vacance il était parti à la découverte d'horizons nouveaux. En tant que prof de géographie, il enseignait les pays lointains tout au long de l'année.  Mais, dès que la cloche des vacances estivales avait sonné, c'était vers un contact direct avec les matières mêmes de son enseignement, paysages et peuples, qu'il partait non en touriste mais en sportif-voyageur disons.  "Ce n'est pas à coup de chèques  que l'on conquiert le monde - écrivait-il - mais à force de sympathie."  Cette préface il y avait déjà longtemps qu'il en avait fait la devise de ses routes d'été, aidé il faut dire par son naturel chaleureux et amical, les liens qu'il savait créer partout où il allait, tout enfin ce qui fait du livre un document aussi précis qu'un carnet de route et aussi large d'esprit qu'un professeur doublé d'un prêtre pouvait avoir sur le monde. 
 
Autant dire que l'abbé Balois n'en était pas à un coup d'essai mais déja passablement aguerri.
 
Mais cette fois il allait pousser très loin le bouchon si je puis dire.
 
Il lui était arrivé un tas de mésaventures, frôlant parfois le drame, en particulier au cours de sa traversée de l'Afghanistan  où il fut jeté en prison, suspecté d'être un espion. 
 
Il avait accompli tout son périple en soutane blanche, (sauf en de rares occasions où elle s'était avérée par trop incommode), un crucifix à son cou,  ce qui lui avait permis de passer plus facilement à telle ou telle frontière, de circuler dans tel ou tel pays peu habitué voire hostile à la vue d'un étranger sur une aussi curieuse monture et même une fois de sauver tout bonnement sa peau.
 
En l'occurence on peut dire que "l'habit avait bien fait le moine" en qui on reconnaissait généralement l'homme de Dieu, ce qu'il sut rester en toutes circonstances, inspirant le respect.
 
Il serait centenaire aujourd'hui mais, où qu'il soit, c'est un hommage sincère que je voulais lui rendre. 
 
                18 Juillet 2020 (St-Benoît-de-la Réunion) 
    
 
 
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